Thalamus Au coeur de la PLRevival 2012
Avec la participation de
Paul, Jean, Pierre, Thierry, Philippe (photos)
et des 2 Franck dont le fils de Madame Irma (texte & photos)
et Philippe L. (photo)
Plymouth subissait un ardent soleil fort peu britannique. Limite torpeur. Baby boom en formation dans les buissons qui bordent le Hoe.
Thalamus amarré sous taud d’été, avitaillait sous le contrôle de Paul et plus particulièrement de Jean & Pierre, les deux dragonistes normands. Franck à la pipe complétait l’équipage que Phil of Saba rejoignait après que Rocquette, coincée à l’aber Wrach, eut déclarée forfait.
Le prologue
Paul propose la barre du ketch vert à Filof pour le départ. Bingo ! Thalamus passe la ligne en tête. Ensuite, les petits airs – malgré les réglages des deux requins du Dragon – n’auront pas permis de franchir la ligne d’arrivée en temps !
Deuxième départ du prologue : trop de vitesse à la bouée, il aura manqué 5 secondes. Donc, un 360 pour repasser la ligne et c’est parti destination l’arrivée placée dans l’axe du RWYC.
Thalamus marquait Baltic Bris mais Paul, toujours fort courtois, l’a laissé passer pour ne pas qu’il ait à virer pour échapper au traquenard où il s’était collé.
– Tu sais Paul, le tribord est une règle de course, pas un acte de malveillance !
Briefing au Royal Western Yacht Club pour une assistance attentive avant le diner et après les superbes douches du port.
Etape 1 – En route vers Douarnenez
De l’air tranquille pour partir sillager. Les passagers du ferry pour Roscoff auront eu un beau spectacle au sortir du vaste Sound plymouthien. Et c’est parti sur le yacht où il fait bon vivre, cuisiner et naviguer. Belle ambiance. Le vent tombe et chacun part à sa recherche, nous croisons et recroisons Ninita qui a décidé de monter et descendre la Manche. Le spi du bord est très pratique en ce qu’il ne gâche pas la vue, mais jugé quelque peu riquiqui pour tirer les 11 tonnes du yacht vert clair. Du coup, le spi asymétrique jaune est exploité dans toutes les positions, avec et sans tangon, au point que l’équipage ne pense plus guère à autre chose qu’à lui en tirer la substantifique moelle. Les quarts s’intercalent – comment Franck a-t-il eu un quart de 9h à 11h du matin ? – avec les repas et la lecture d’un roman que Paul, assis à l’ombre du mat, déclame et commente.
La seconde nuit est attaquée parmi les rares cargos. Pangur Ban s’accroche au sillage. La nuit tombe avec du vent comme l’annonce de réduction de parcours – ar gazeg affair – à la Jument. Fausse panne parmi l’équipage alors que le vent poussant monte d’un cran ! Empannage délicat de l’assy, Pangur Ban en profite pour nous passer. Mériterait une fessée, Pan Pan ! Triste d’arrêter la régate à 3h du matin alors que le vent monte poussant ! Thalamus, allongeant vraiment la foulée, rattrapera 4 concurrents avant Douarnenez.
Les 2 Normands partent revoir leur Normandie en promettant d’adhérer au YCC « ne serait-ce que pour la magnifique revue ! ».
Superbe diner made by Michel et sa dream team puis discours bilingues par Benoit et Thomas ; dont ce fameux concours des histoires de la Plymouth à l’initiative de François of MTT 3.
Etape 2 – De Douarnenez à La Rochelle
Thierry of Rouvelon et Franck, le fils de Madame Irma (ne dites pas à ma mère que je suis photographe, elle me croit wincheur sur un ketch vert) remplacent Jean & Pierre.
– Les bribes de souvenirs de Franck, alias Robinson Crusoë, photographe, depuis la stratégique cabine arrière :
La nuit ultramarine va survenir bientôt, brutalement comme chaque soir de chaque jour, qui va mettre un terme à mes écritures, mais je vais poursuivre dans le noir qu’il fait alors, mon dialogue avec vous.
J’ai toujours rêvé de voyages et j’ai beaucoup voyagé. Celui-ci sera le dernier sans doute, qui m’aura tant comblé, tant il aura rejoint mon imaginaire. Que peut-on envisager, en effet, au-delà de l’imaginaire ? Je suis allé au bout des rêves, hormis celui de vous revoir et qui me tient encore éveillé.
Demain je poursuivrai l’inlassable récit de cette incroyable aventure, mon testament peut-être, d’un grand amour que nous n’aurons pas vécu. Mais je continuerai de croire, au-delà de tout ce bleu, et jusqu’à mon dernier instant de vie, que nous nous sommes dit les quelques mots nécessaires qui président une grande histoire d’amour.
Je vous écris de la plage. Je vous écris sur la plage, d’irréversibles serments, gravés dans le sable au moyen d’un complaisant bâton.
Le navire qui m’a perdu s’est perdu lui aussi, me laissant sans vie et démuni de tout sur cette plage de paradis où il m’a fallu renaître, aux seules fins j’en suis sûr, de vous laisser ce message.
Vous allez rire encore. J’aurais bien confié une bouteille à la mer, mais je n’ai ni papier, ni crayon, ni bouteille !
Prends soin de toi, c’est là mon unique réconfort.
Mais la nuit tombe qui va m’engloutir.
– Et les épars souvenirs de Thierry.
Quand j’arrive vers 13h à Douarnenez, j’ai déjà pris une salade et un dessert à Quimper en attendant le car. Il n’y a personne à bord de Thalamus et en faisant le tour des bateaux je suis happé par Roger et Eliane sur Men Brial où je n’ai d’autre choix que de manger (et boire) une seconde fois dans une excellente ambiance. De retour sur Thalamus, je fais la connaissance de Paul aux prises (du 12 volt) avec des problèmes électriques et qui espère encore pouvoir monter son vérin de pilote automatique avant le départ du lendemain. Je retrouve ensuite Philippe, ma plus ancienne relation du YCC, puis fait connaissance des deux Franck(s). Cet équipage sympathique me semble l’augure d’une excellente navigation.
Le soir, le repas des équipages est plantureux et les restes considérables tant en nourriture qu’en boisson. Des membres de l’équipage ont la riche idée de rapporter à bord du poulet froid et des « cubis » à peine entamés. Ils seront finalement notre principale source d’alimentation durant ces deux jours de traversée, un membre de l’équipage (mille excuses pour le trou de mémoire) en fera même un ragout. Il règne dans Thalamus un désordre normal pour un bateau au port et de temps à autre je pose la question où doit se ranger tel ou tel objet. Je n’ai pas toujours une réponse et je m’étonne que ce léger désordre ne diminue pas alors que nous nous approchons du départ. Je me dis que nous allons avoir des soucis dès que nous naviguerons ou alors que sur Rouvelon, seul bateau que je connaisse, je suis un inutile obsédé du rangement.
Le lendemain, dès que nous sommes sortis de Port Rhu et que nous avons établi les voiles l’état intérieur de Thalamus est toujours le même, sa faible gite et les mouvements lents de sa longue carène laissent tous les objets en place. Finalement, je ne changerai pas mes habitudes sur Rouvelon! Avant le départ une première discussion a lieu entre des équipiers (Philippe et moi-même) et Paul au sujet de la position des points de tire de l’écoute de génois, ils nous apparaissent bien trop reculés, finalement, Paul se laisse convaincre d’abandonner ses vieux réglages.
Premier virement de bord, premier problème, le gousset du nerf de chute du génois se déchire et le nerf s’accroche sur le mât. Après concertation tout reste en l’état et nous ferons nos virements de bord en enroulant partiellement le génois dans une parfaite coordination.
Pour le départ la barre est confiée à Philippe en route vers le trophée Langlois et dont la réputation a franchi les frontières. Le premier bord bâbord amure est avantageux et nous le poussons à bout et lorsqu’il faut nous devons tirer le bord tribord suivant nous bénéficions d’une adonnante durable. Tout cela est bien parti!
Pour me tester, Paul me confie la barre. Je n’ai jamais barré avec une barre à roue et je dois me concentrer pour ne pas faire d’erreur. Après un virement de bord, Paul me demande de lofer, les réflexes de la barre franche reprennent le dessus et j’abats en grand provoquant une certaine consternation. J’imagine qu’il se dit « quel est ce débutant qu’on m’a refilé! ».
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Passage du raz de Sein avant que le vent faiblisse et que le courant s’inverse entrainant une longue traversée de la baie d’Audierne. Les quarts sont de trois heures à deux avec un décalage de 1h30. Je fais la première partie de mon quart avec Paul et la seconde avec Franck Bichon appelé Franck II car il est monté à bord après Franck Quérat fondateur de la dynastie. Le vent est faible, il pleut et mon ciré léger prend l’eau, je regrette d’avoir voulu voyager léger.
La journée suivante nous inaugurons le port du spi asymétrique sur tangon. Thalamus gagne un noeud. Il parait qu’il faudrait breveter le procédé. Voici quinze ans sur Rouvelon, ayant éclaté mon spi, j’ai bien porté mon ghoster sur tangon, mais il n’y a pas de document public l’attestant et je ne pourrai faire valoir mon antériorité. Le soleil revenu et après une concertation où chacun fait valoir ses arguments avec conviction, nous décidons de passer au sud de Belle Ile, estimant que la brise thermique y sera plus élevée que dans Les Courreaux. Nous sommes en compagnie de Ninita qui devant nous tire des bords de largue. Entre le Skeul et Kerdonis nous devons tirer un bord sous spi extrêmement serré et le résultat au passage de la bouée n’est pas complètement convainquant, néanmoins nous sommes encore en contact visuel avec les premiers ce qui n’est pas si mal après plus d’une journée de course.
Pour la deuxième nuit, l’ordre des quarts est repris à l’identique et le matin nous sommes entre Yeu et Les Sables d’Olonne où le vent s’écroule. Nous sommes bord à bord avec Talia, Pangur Ban et d’autres. Comme local de l’étape, on me confie la barre et pour éviter de tirer un bord, je passe entre la Petite Barge, visible à mes yeux et sa marque sud (pas bien!). Cela nous permettra de bénéficier d’une des dernières risées et de raser la côte à la recherche du moindre souffle. Nous tirerons tout même un bord de 200 mètres pour éviter quelques rochers à la pointe du Payré. Nous coupons tout de même la baie de Longueville, c’est une erreur, un concurrent (Chrisando?) longe la plage et prend une bonne avance. Nous avons tout de même bien marché en travaillant le spi et la barre comme sur un 420. Franck le fondateur lofe et abat en permanence pour maintenir l’incidence au mieux pendant que j’embraque et choque en permanence l’écoute de spi. Avec 120m2 c’est déconseillé au delà de quelques noeuds de vent. Au niveau des Baleines, nous rattrapons Khayyâm puis il reprend son envol dès que le vent se relève. Nous faisons alors jusqu’à l’arrivée un bord à bord avec Talia qui lors d’une manoeuvre hasardeuse manque le chenal officiel du pont.
Durant cette belle journée Philippe est en verve faisant jaillir saillies et bon mots chacun s’y mettant mais sans jamais pouvoir égaler le maître.
La parade, l’accueil au bassin du Musée, à la Mairie,
au club house et les résultats.
Nous avons fait un beau voyage et sommes heureux d’en faire profiter ceux qui ne l’ont pas fait !
Bel accueil, sirène époumonée du France 1, belle parade au moteur et sous le soleil venté. Tout bien parfait. Joies classiques.
Epilogue
Paul l’armateur est dans la foule pour la proclamation des résultats. Lorsqu’il entend que Thalamus (qui fut le yacht de son père), outre un Langlois à son actif, arrive en 5é place, il a juste commenté : « Je vais envoyer une carte postale à ma mère pour le lui dire ! ».