Edito Juin 2011
Çui là qui fait les foins en juin
Aurait d’la chaleur de trop
Qu’ça m’étonnerait point
Et qu’si son champ manque d’eau
L’a qu’à v’nir avec nous aut’es matelots
Voir la mer d’près sur not’ bateauComptine de Thomas Lacon (1873 – 1954)
A propos du rien vélique lorsqu’il y a trop ou pas assez de vent.
When sailing is between nothing and too much.
La mésaventure arriva à des amis nautiques qui adoraient naviguer. Ohé ohé. Un beau matin, ils quittèrent, alertes, le port de Bizerte (بنزرت), port tunisien posé à 10 bornes du Cap Blanc. Justement, leur départ matinal, à l’heure où fléchit ta compagne, l’était trop car le vent lui n’était pas levé. Calme blanc sur le cap Blanc. A environ 20 milles devant. Entre, les îles Cani, Bal et Zet. Voiles en taud, ils scotchèrent assoupis.Cani Islands…qui est Zet ? Bal est là ?
A la tombée du jour, lorsque tel un voile de bayadère berbère, le firmament (ah ! vous dirai-je, Maman) piqueté d’étoiles orientales devint bleu sombre horizon puis voute céleste au-dessus du sac de couchage où le dormeur oppressé tente vainement de vaincre sa claustrophobie, le port mauresque étant plus proche que la pointe blanchâtre, ils s’amarrèrent le soir comme ils s’étaient désamarrés le matin. Même solitude au quai graisseux du même dock envahi par les chacals chapardeurs ricaneurs.
– Font froid dans le dos, ces cons !
– Dis plutôt que c’est con d’avoir froid dans le dos avec cette chaleur !
– Le chacal est un con et plein de chacals même invariables en nombre font invariablement beaucoup de cons.
– Surtout les femelles, …
– Je te l’accorde. Tu pourrais nous jouer une fugue enlevée sur ta guitare de mer ?
Des cordes les notes s’égrènent comme des gouttelettes empapillotées dans la torpeur lourde d’un orage qui ne crèvera jamais.
– Le mi bourdon manque, à l’instar de Keith Richard, mais ça donne plus d’aigus, avait dit le guitariste en embarquant. Juste après avoir prononcé Salam Alikoum et de ne plus rien dire depuis. Le gros rouquin qui faisait office de cuistot à bord lui avait apporté une boite de loukoums vierge.
Once upon a time, unknown friends of mine (may be) sailed on a boat from Bizert in Tunisia. No wind. The morning they started was the same that the evening they anchored back at the same place in the same port where jackals sneered. Mainly bloody one.
En mer comme sur terre, mais en mer surtout, quand il n’ya pas de vent, le bon marin pinaille et finasse dans les mini risées et les semblants de courants, grimpe au mât observer la surface impavide de la bonace liquide mordorée. L’autre marin, le huileux graisseux, fait le fier au moteur. O Tartarin tu fais le malin ? Certes, il arrive à l’heure mais où est son bonheur ?
Et puis les jours où ça gifle et pète et rôte dans les longues plaintes violentes secouées des changements de caps soudains des rafales, tu cales ton canote pied dedans, 3 ris serrés et un bout de foc blindé, tu accompagnes ses ascensions et ses descentes comme le cavalier suit sa monture.Lady Godiva by John Collier
– Comme le cavalier … épouse sa monture ?
– tu veux te marier un cheval ? tiens, prends la barre, je fatigue.
Ils souffrent comme ils savourent. Le canote, le matos et leur alliance du moment.
– Maudit bateau dit le mauvais matelot.
– Matelot de mes 2, rétorque le bateau.
At sea or on the ground, when the wind is nothing, the good sailor tries to sail between light airs and lost streams, climb on the mast to observe the flat sea surface. The common sailor starts his engine looking for his common happiness.
And days when winds blow up, the tired crew love this particular weariness made of free will for vain victory: doing our best for nothing but the glory of done it!
La suite à suivre puisque les compte rendus de régate sont rangés à leur place et que Lady Taud caracole, nue comme lady Godiva of Coventry, sous d’autres rubriques. Donc, on retourne bientôt vers Bizerte. Vous avez dit bizarre ?
et toujours…
Tsunamis, le coup de cœur de la rédaction de Thalassa juin 2011