La Coupe des 2 Phares et l’extravagant déboulé de Nérée

img5434cd6c23af6Après avoir couru la 2 Phares plusieurs fois  avec Escapade, Saba évidemment mais aussi à bord de Sinbad (3 Phares from Cork) et  de Thalamus, l’édition 2016 dans l’extrême chaleur brestoise s’effectuera à bord de Nérée. Question : mais pourquoi donc a-t-il embarqué à bord de Nérée celui que nous vîmes en vainqueur entre Dartmouth, Plymouth & Brest ? Seul(e)s celles & ceux qui apprécient les yachts classiques, non pour ce qu’ils représentent comme objet mais pour ce qu’ils apportent comme partage humain, adhèrent. Libre à chacun de voir midi à sa porte comme à d’autres de ne pas partager les mêmes notions temporelles. La liberté n’a de valeur que celle de pouvoir se libérer de ses chaines.

Bon d’abord Nérée, j’avais déjà connu au YCLB lors des Voiles de Légende 2013

Extrait – L’ambiance était très Collège de France. Les réparties fines, les citations exquises, les commentaires éclairés se mêlaient aux tournures graveleuses mais recherchées expédiées au rythme d’un tir de barrage lorsque, cédant à la poussée d’Archimède, il s’effondre en noyant la vallée où d’innocents anonymes à 2 et 4 pattes passent et paissent en paix. Donc ambiance Collège de France qui pourra autoriser à rappeler que, chez les Grecs, Nérée est un dieu marin primitif, surnommé le « vieillard de la Mer ». Fils aîné de Pontos Le Flot et de Gaïa La Terre, il est le mari de Doris (le Tina de Pierre Follenfant ?) et le père des cinquante Néréides, quelle santé ! Qui, elles, les chéries, sont des nymphes marines telles qu’on en voit sur la plage devant le yacht club. Elles portaient souvent des tridents (les prothésistes dentaires balbutiaient encore) et chevauchaient des tritons qui, sous l’appellation de salamandres, permettaient de se chauffer les fesses.

nereeCôté infos classiques, Nérée (14 m ht) a été conçu en 1965/1966 par Maurice AMIET à l’initiative de Monsieur Carlier, médecin à Nice, pour un programme de navigation en croisière hauturière familiale. Construit en acajou,  acacia et iroko, Nérée fut le plus grand bateau construit par Félix Silvestro.

Le boss, c’est Jérôme, l’ex pilote de chasse qui parvenait dit-on à faire battre des ailes ses avions pour voler encore plus vite !

– Il est toujours comme ça ? » S’enquérait une donzelle à couple.
– Yes oui, répondis-je en franglais, toujours entre intrados, extrados et radada à mach 24 !
– Radada aussi ? S’émerveilla-t-elle écarquillée avant que nous entonnions Farewell Angelina, the bells of the crown are being stolen by bandits, …
– Jéjé, Farewell c’est bientôt qu’tu le mets à l’eau? Et elle ne s’appelle pas du tout Angelina !

13335793_10154201219836354_7287196862794862379_nFocus : Farewell 1949 Cotre bermudien – 14.4m Architecte: C. Boucard, à voir en saison prochaine ?

Etat des lieux : la particularité de Nérée est d’être éternellement amputé (privé ?) de son artimon ; il régate tel un boxeur qui affronterait son adversaire avec une main menottée dans le dos. Virer de bord nécessite d’abattre avant ! Et que les voiles – la GV sur enrouleur de mat – ne sont guère de la première fraicheur si fraicheur a encore un sens. L’atout majeur hyper utilisé est l’incroyable spi de 14000 m2, soit 1 ha et 400 ares, environ. Utilisable de 40° du vent jusqu’à n’importe quoi !

14344225_1480071845342558_2315388215472249675_nL’autre particularité du moment fut que l’alternateur ne produisait plus d’électricité et qu’il a fallu régater dans le noir et naviguer sans aucun instrument pour tenter de conserver de quoi démarrer le moteur. Donc nav’ à la mano. On ajoutera que le bon Nérée (que certaines mauvaises langues pâteuses surnomment « Gros Néné ») si je peux me permettre était loin d’être préparé, qu’il fallut ranger a minima pour circuler et avitailler itou pour manger.

Ze C2P

L’équipage: Cécile “queen of the fore deck”, le boss supersonique, Aymeric du C2V, Christophe de Brest et ma pomme.

Et c’est parti ! Quasi 100% spi, depuis le raz passé au Chat dans les tous petits, mais petits, airs à peine spiable dans les virements.
Alternances, airs, pas d’airs, petits airs, brumes, tagliatelles au foie gras – merci Christophe – tout sous spi effondré gonflé.
Nuit & brouillard. On avance, on avance sans trop savoir où faute d’instruments. Tout à l’instinct, celui du boss qui sait toujours où il est à 5° près et le Muscadet titre 12 !
Pas vu Penmarch estimé à 45 milles au nord. Pas vu rien. On continue comme ça avant de plonger vers Ré.
– Oups, les IC disent qu’il faut faire Yeu par l’intérieur.

Le vent revient, à 65° de la route, 10 à 20 nds estimés. Spi débrassé tribord et ça court, ça vole, hard à la barre (gast d’artimon). Quarts au hasard, on vole, on tient.

Fin d’après-midi, Yeu dans les yeux. Le spi jaune de Thalamus et d’autres loin au nord et à la côte.

baleinecroasse

On déborde passés les Corbeaux, le vent apparent s’écroule, alors on fait dans la ficelle de spi. Port Joinville défile lentement, très. Un bateau gris mouillé, relais de course ou pas ? Comme nous captons le message de passage de l’excellent Clarion of Wight – estimé 40 mn devant malgré ses ennuis «  rupture de la drisse de spi puis casse des deux poulies des bras et écoute de spi un peu plus tard,  départ au lof à 1h30 du matin la première nuit au terme duquel l’écoute du spi se décroche et rend son affalement sportif » – à la VHF portable, on se présente aussi. Merci, bonne route.
Plus on descend, plus le vent fait pareil. Ça tient tant qu’il n’y a pas de vagues. Aux Sables ça remue comme d’hab. La nuit tombe. Lumières à la côte. Les Baleines devant, maison ! Ben non.

Qu’il est long, qu’il est loin le chemin qui mène vers toi !

charente-maritime-baie-de-laiguillon-pertuis-breton-sud-vendee-ile-de-rePertuis breton parfois à reculons : aurons-nous le temps de passer le pont avant la renverse ?

Epilogue (toi même!)

Nous l’avons gagné ce temps main sur main, brassage, débrassage, tangon baissé levé, chasseurs de vent, de risées et de coulis. Fatigue et tension. Mots de silence sans pensées exprimées. On optimise les doutes.

formation-pilote-5-quote-3Le boss qui barrait depuis des heures, coup de fatigue, m’a passé le manche. On a passé le pont ! Le courant renversait. Sur l’eau plate, le vent adonne et refuse : on garde le spi pour passer La Pallice: les môles dans les molles. Gast de spi ! Il a tenu à 40° du vent, bridé comme un génois asiate (mouais !), moins de 40° sans doute. Tout est passé sous le vent avant d’abattre vers la ligne d’arrivée.

Sacré Nérée ! Sacré boss ! Sacré équipage ! Kisses.

Envoi

Nous n’avons rien cassé – hormis le pouce de Cécile quelque peu malmené – malgré les acrobaties spiesques et la navigation 100% estime (de soi et des autres). Qu’importe le podium lorsque la bataille fut jolie!

20160721_170652

Rentrée au bassin du Musée depuis la terrasse de l’Aquarium (photo by Elle)

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Les commentaires sont fermés.