Retour de Galice. Rouvelon brise son mat au large de La Corogne
Interview de Bernard R., homme de qualité, connu pour avoir fréquenté la cousine de Winston Churchill
Moi : Bernard, dis-moi comment ça c’est passé ?
BR : nous remontions au près, vent F 5/6 dans une mer chaotique éclairée par les éclairs d’orages secs. Rouvelon marchait bien et l’équipage – Jean Thierry le boss, Emeline, Véronique et moi-même – se portait bien.
Moi : la descente aller s’était passée ?
BR : très bien. Nous avons fait 3 eme. Du reste je me souviens, en 45, de la pharmacienne du 3eme arrondissement partie chercher à la cave de l’eau oxygénée pour teinter les cheveux d’un officier allemand. Une bombe et la pharmacie a explosé, elle est remontée avec son flacon, …
C’est le roi Juan Carlos qui a remis la coupe à Jean Thierry!
Moi : Bernard, faisons court, revenons à Rouvelon.
BR : certes. Nous étions à 40 milles de La Corogne. Nous avons viré de bord, j’étais à l’intérieur. Et là, j’ai entendu « merde ! » suivi du bruit d’un choc terrible. J’ai cru que nous avions touché un autre bateau ! Bruit violent. Très.
Moi : moment difficile ?
BR : le film de ma vie est passé à toute allure. J’avais marié mon fils et participé au mariage de ma fille 20 jours plus tôt. Et même dansé un rock avec mon ex-épouse. Ce qui me rappelle – le bruit violent – lorsque notre collège de Jésuites a explosé puis brulé. Mais j’ai pu récupérer des bancs de l’église, le lit où dormit la belle-sœur de Mastroianni.
Moi : Bernard svp ? Au fait.
BR : La ferrure de mat au niveau des barres de flèche avait cassé. Le mat était sur le pont, les voiles dans l’eau. Tout le monde est resté calme à bord. J’ai pris silencieusement la barre tandis que Jean Thierry et Emeline dégageaient le winch de génois coincé dans la filière. Rouvelon faisait des bonds, retenu par son gréement devenu ancre flottante.
Moi : et ensuite ?
BR : Plus de mat, plus d’ais, ni Vhf, ni GPS, … Jean Thierry avait une antenne de secours pour l’ais. Nous avons eu La Corogne. Ils ont annoncé la venue d’un canot de sauvetage.
Moi : oui ?
BR : je suis resté à la barre tandis que Jean Thierry et les miss rangeaient et coupaient. Nous avons récupéré la bôme et le génois. Le temps paraissait long. Très.
Moi : les sauveteurs sont arrivés ?
BR : 55 mn pour faire 40 milles ! 55 mn très longues pour nous. Et sans doute très secouées pour eux. Les 3 sauveteurs voulaient nous remorquer à 10 nœuds. Jean Thierry savait que Rouvelon ne résisterait pas à un tel traitement. Il a choisi de couper et laisser couler tout ce qui gênait et nous avons repris la route vers La Corogne précédés de la vedette. Entre temps, le vent était tombé laissant place au brouillard et à la mer chaotique.
Il aura fallu 6 heures pour parvenir à La Corogne plongée dans le brouillard.
Moi : Merci Bernard. Tu me fais penser à te rapporter la meuleuse que tu m’as prêtée.
BR : Bonne soirée. Amitiés à Béatrice.
Rouvelon est un Maïca, plan Illingworth de 1962 construit chez De Rovère à La Seyne Sur Mer (pas Seine!) comme le Maïca Maïca suisse de Pavel; alors que Saba fut construit chez Bertin à Carqueiranne. Rouvelon est sans nul doute le Maïca qui accumule le plus grand nombre de milles depuis 2 ans.